Insolite : il critique les nouveaux philosophes sans citer Deleuze !



Paris
les habitués du bistrot Le renommé, rue Doudeauville, dans un quartier populaire du XVIIIe arrondissement, ne s'en sont toujours pas remis. La scène a eu lieu ce matin vers 11 heures. Comme chaque matin, les habitués de ce troquet comme il en existe mille dans notre belle capitale, commentaient l'actualité de la vie des idées. les conversations étaient encore hantées par la figure de René Girard, disparu il y a quelque jours, quand soudain la nouvelle est tombée : c'est André Glucksmann qui venait à son tour de trépasser. Aussitôt, les trois clients présents ce matin-là se sont emparés du sujet : André, dit Dédé, rappela son passé Maoïste. Nordine, dit Beau Gosse, évoqua son intransigeance pour les régimes totalitaires. Geneviève, dite Ginou, laissa entendre que si l'importance d'un philosophe se mesurait à son œuvre stricto sensu, il fallait peut-être nuancer certains appréciations louangeuses qu'on venait d'entendre sur le défunt essayiste. Tous les regards se tournèrent alors vers Jean-Pierre, qui devait clore le débat. Sans doute allait-il allait aborder l'engagement atlantiste et sarkoziste du penseur. Tout semblait se passer comme d’habitude, dans une mise en scène fixée de longue date. Quand soudain, à la stupeur générale, Jean-Pierre s'est contenté de critiquer les idées d’André Glucksmann, sans citer une seule fois l'interview donnée par Gilles Deleuze en 1977 !

On ne sait pas ce qui lui a pris, commente Nordine. Pourtant, à chaque fois qu'il faut dire du mal d'un nouveau philosophe, on se contente de réciter ce passage de l'interview de Deleuze, et puis comme ça, c'est fait. On n'a pas besoin de s'emmerder. On est entre nous, de toutes façons. Je ne sais pas ce qui lui a pris, mais il a utilisé tout un tas d'arguments et de raisonnements, explique-t-il. Avant de conclure : c'était gênant.

Gênant, c'est le moins qu'on puisse dire. D'autant plus que la scène a été filmée et que l'intervention de Jean-Pierre a vite fait le tour des réseaux sociaux. La vidéo où il critique les nouveaux philosophes sans citer Deleuze a été vue des milliers de fois en quelques heures, donnant naissance à une foule de vidéos parodiques. On voit ainsi un internaute critiquer Wagner sans citer Debussy, ou un autre critiquer l'intolérance sans citer Voltaire.

Du côté de Jean-Pierre on se défend, en jouant les iconoclastes : Je sais très bien que j'étais sensé citer ce passage, qu'est-ce que vous croyez ? Je m'en sers à chaque fois qu'on commente le bloc-note de BHL ! Mais j'en ai eu marre. J'ai eu envie de mettre un coup de pied dans la fourmilière, de briser le tabou du Deleuzisme ; explique Jean-Pierre qui se dfend pour autant de toute sympathie pour la pensée de Glucksmann.

Je crois qu'il y a une place pour la pensée entre Deleuze et les nouveaux Philosophes, explique-t-il. Il devrait annoncer sous peu la création du mouvement NGND : Ni Glucksmann, Ni Deleuze.

CNL : l'aide à la lecture


Au milieu du succès de l'opération Lire en Short, l'annonce est passée à peu près inaperçue, mais elle pourrait avoir des conséquences importantes. Dès l'automne 2016, le Centre National du Livre (C.N.L.) pourrait expérimenter un nouveau dispositif de soutien au livre : l'aide à la lecture.


Un dispositif habituel mais un cadre élargi 

Sur le papier, rien ne différencie ce nouveau dispositif des classiques aides à la traduction, bourse d'aide à l'écriture ou encore subvention à un projet thématique pour les bibliothèques : il s'agira de déposer un dossier justifiant d'un certain niveau de dépense Ces dossiers seront ensuite examinés par une commissions composée de professionnels de toute la chaîne du livre et les dépenses proposées pourront être soutenues de 30% à 90%. Rien de bien neuf. Les habitués de la demande de subvention ne seront pas déstabilisés par le nouveau formulaire. 

La nouveauté vient du cadre de ce dispositif, qui a finalement été étendu aux personnes privées. Il sera ainsi possible à tout un chacun de solliciter de la puissance publique une aide financière pour lire un ou plusieurs livres. A titre expérimental, un entrepreneur des Deux-Sèvres (79) a ainsi bénéficié d'une bourse de 1399 euros par mois, pendant six mois, pour lire la totalité des Carnets de Pierre Bergounioux.Il a accepté de revenir sur l’expérience.

«Je suis heureux d'avoir pu bénéficier de ce nouveau dispositif. Ça s'est révélé plus qu'utile à mon projet de lecture. Vous voyez, j'adore vraiment Pierre Bergounioux, et j'avais vraiment envie de lire ses Carnets. Mais franchement, ça fait au moins trois mille pages. Au début, je me suis dit "pas grave, tu en liras un peu tous les soirs, et ce sera lu avant que tu ne t'en aperçoive". Mais il dit toujours la même chose ! Et que je t'étend une lessive, et que je t'écris une malheureuse page, et que je te fais les courses, et que je te pêche trois truites ! Je veux bien lire des gros livres, mais moi aussi, j'ai des lessives à étendre. Et plus encore, j'ai une entreprise à faire tourner. Dans ces conditions, je n'aurais jamais pu parvenir à lire ces bouquins. Mon humeur s'en ressentait. Je fuyais les conversations avec mon épouse. J'avais peur que ça me fasse perdre du temps. J'ai essayé plein de solutions pour me dégager du temps de lecture. J'ai même tenté un congé parental, mais c'était une très mauvaise idée de s'imaginer pouvoir s’occuper d'un môme et lire dans les mêmes journées. Le seul moment où j'ai pu lire un peu, c'est quand mon deuxième était aux urgences. On attend des heures là-dedans ! Mais ça ne suffit pas. J'ai repris le travail. J'en voyais pas le bout. J'allais désespérer.

"J'ai essayé plein de solutions pour me dégager du temps de lecture. "

Et puis, j'ai entendu parler de ce dispositif. C'est un ami poète, qui cherchait une bourse d”écriture et connaît quelqu'un à la commission «lecture, territoires et compétitivité» qui m'en a parlé.
J'ai appelé la DRAC. Ils m'ont dit que ça pouvait se faire à titre expérimental et que j'étais le candidat idéal. J'ai déposé le dossier et ça a marché. Concrètement, j”ai pu lire pendant six mois sur des horaires de bureau. Je déposais les mômes à l'école, j'étendais une lessive, un peu de repassage et zou ! je m'avalais cinquante pages d'affilée. A ce rythme là, j'ai eu tot fait de m'enquiller les trois volumes. Et le dimanche, j'étais disponible pour ma famille. Détendu. Et plus cultivé.»

Un dispositif vertueux


De son côté, le président du Centre National du Livre insiste sur le caractère vertueux de ce genre de financements :

«Avant, on avait des dispositifs de subvention pour les auteurs, pour les éditeurs, les traducteurs, les illustrateurs, les libraires et meme les bibliothécaires ! Mais on négligeait une des extrémités de la chaîne du livre. Avec cette nouvelle subvention, on escompte une hausse notable des chiffres de lecture des livres français et étrangers, et franchement on a tous à y gagner»

"Une fois de plus, on aide ceux qui n'en ont pas besoin."


Le son de cloche est un peu moins enthousiaste chez le professeur Massé-Daoulas, économiste, spécialiste du marché du livre

«Ça peut sembler une bonne idée au départ, c'est certain. Et dans une certaine mesure, ça l'est. Quand on pense au nombre de romans offerts à Noël et qui ne sont lus au delà du premier quart que par un dixième des lecteurs, on se dit qu'un tel dispositif était nécessaire. Il faut bien comprendre que la situation a énormément évolué, depuis la seconde guerre mondiale. On avait alors un marché de l'édition où tous les livres étaient écrits par des oisifs privilégiés, des Gide, des Martin du Gard, qui avaient assez de patrimoine pour sacrifier à cette activité de prestige, car leur familles avaient capté une part substantielle de l'excédent de production. C'est une situation bien connue d'oligopole, mais il en allait de même mutatis mutandis pour les lecteurs. Ils formaient, quoique plus nombreux, une caste de privilégiés.
Et puis avec la diminution du temps de travail, tout le monde s'est mis à écrire. Le moindre prof de géo voulait parler de son père, de l'Histoire, de l'ineffable... On s'est retrouvé avec des rentrées littéraires à mille titres. Saturation du marché, dévalorisation des titres, report des consommateurs sur les valeurs sûres...on connaît la suite. Le dispositif d'aide à la lecture se propose de briser ce cercle vicieux, mais sans un effort d'application particulier, j'ai peur qu'il ne bénéficie qu'aux plus gros : les Patterson, Mankell et autres Marc Lévy... Une fois de plus, on aide ceux qui n'en ont pas besoin. C'est pourquoi, je préconise une conditionnalité de l'aide, soumise à l'avis de commissions d'experts réparti sur le territoire».

Et pour le numérique ?


Le texte définitif devrait spécifier les conditions d'attribution des aides. Plus de précisions vers la fin du mois d'aout. En attendant, de nombreux passionnés de littérature commencent à affuter leurs argumentaires, tel ce jeune chômeur du Maine-et-Loire qui se propose de lire tous les essais de Philippe Sollers. Le texte, pour l'instant, ne concerne pas le numérique, au grand dam de ce gendarme de la Nièvre qui a déjà pris une année sabbatique pour une lecture comparée du bloc-note de François Mauriac et du Blog de Claro.

Comme un clou de Mithril dans une enclume de beurre : rapport d'activités 2014

On m'a demandé, ce jour-là, alors que j'avais commencé la rédaction depuis un moment déjà, après lecture de ce que j'avais déjà écrit, et sans plus de considération pour l"effort déjà fourni -non que ç'ait été pénible, mais former des phrases, pour peu qu'on y prenne garde, est toujours un effort- on m'a demandé disais-je, avec les meilleures intentions du monde et sans vouloir me heurter, comme on conseille à un cadet de ne pas partir en randonnées avec ces chaussures-là, mais pour être sûr que j'atteigne bien le but que je m'étais fixé en commençant ces phrases, et sans considérer non plus que mon lecteur, celui à qui je destinais ces phrases fût un idiot, un illettré ou simplement un de ceux que l'effort, fût-il minime, rebute, de faire des phrases courtes.
Des.
Phrases.
Courtes.
Considérant qu'il ne m'était pas impossible de remplacer ce point virgule par un point, cette subordonnée par une phrase autonome, que mon lecteur pourrait bien coordonner lui-même tout ce merdier, sans avoir recours aux conjonctions qu'on emploie le plus souvent à cet effet, que la multiplication des incises rendait difficile la lecture et la compréhension de mes phrases pource que lorsqu'on était rendu au bout, on ne pouvait plus même se souvenir de son commencement, et qu'enfin il ne s'agissait là que d'une putain de note administrative, je dois reconnaitre que ce conseil était bon.
J'en ai fait des courtes.

 
Dans un contexte de fortes mutations, j'ai poursuivi  mon activité malgré un contexte budgétaire contraint tout au long de l'exercice 2014. J'ai su mobiliser des énergies nouvelles pour mettre en place des dynamiques structurantes sur l'ensemble du territoire. J'ai renforcé mon dispositif de partenariat, merde de merde, ça sort tout seul, qu'est ce que c'est que ces phrases qui sortent toutes seules, j'ai même pas ouvert la bouche, j'ai même pas pensé ça sort de mes doigts j'en ai sur moi, je pue, il faut que je prenne une douche, que je m'éloigne de ce clavier.

N'écoutant que mon courage, j'ai participé activement à des prouesses et j'ai été force de proposition dans d'intenses révolutions de la beauté. J'ai par ailleurs assuré le pilotage de mes plus sombres errements dans un contexte fortement contraint par le néant absolu et l'effilochement en forte hausse de mes pensées.

Comme un vieux pull.
 
On peut dire que je n'ai rien fait avec rigueur, autonomie et un grand sens du travail en équipe. D'un point de vue quantitatif, la stagnation de la signification de tout ce merdier est notable. Elle se hisse aux alentours de 0,11% durant l'été et subit un tassement tout au long de l'automne qui l'amène au niveau de l'ensemble de mes jours à la saison froide. Le doute s'accroît également, tout au long de la chaine de production et sur l'ensemble des sites, mais cet accroissement reste difficile à mesurer faute d'indicateur pertinent. 

Les perspectives de développement et d'élargissement des marges d'espoir à l'horizon 2016 et pour l'ensemble du projet ne nous permettent actuellement pas de prédire un succès total.





 



Cette belle petite vie. (petite annonce)

Tu te tenais exactement au centre. Un monde a existé pendant quelques instants ce vendredi 22 mars 2013 et tu te tenais exactement en son centre.

De grands mammifères tout d'abord nous ont accueilli. Nous avons tourné autour. Suivant, scolaires, la spirale qui conduit des protozoaires à la faune des imagiers. Mon fils tenait ma main, écoutait peu mes commentaires, me pressait vers l'éléphant.

La Grande Galerie de l'évolution était vide ou peu s'en faut, c'est à dire que ne s'y trouvaient de vivants que trois vieillards, mon fils, toi et moi. Tous les autres étaient naturalisés. Un silence de cloître, évidemment.

Les galeries étaient baignées d'ombre et nous y tournions, approchant le centre avec lenteur. Un beau parquet comme ça, pensais-je, et ne jamais y laisser jouer le soleil, c'est tout de même dommage. Mon œil cherchait la lumière. Je balayais du regard les Eucaryotes et les gymnospermes et soudain tu te tenais au centre, point de mire et centre irradiant.



Tes joues était rouges et ton épiderme moite. Tes bras étaient occupés de travail, tenus en l'air. Tu étais tellement emplie de toi-même à ce moment que l'humanité entière, autour en contrebas, n'était qu'un tas d'herbes sèches. Ai-je dit que tu te tenais sur un escabeau ? Que trois projecteurs étaient braqués sur toi ? Périodiquement, tu soufflais en ramenant ta mâchoire inférieure en avant pour rejeter une mèche de cheveux qui te tombait sur les yeux. Ton œil bleu ou noir ou vert ne regardai que ta tâche. Ton aisselle promettait un monde de parfums. 

Toute la création aboutissait à toi. 

Je tournais toujours, autour de toi désormais. Qu'un barbare t'adresse la parole, je l'aurai tué de ma main. Je t'ai regardé autant que j'ai pu. J'ai empli mes yeux de ta sueur, de ta peau, de ton effort. J'ai vécu, pendant quelques minutes une vie entière à tes côtés. Je travaillais, moi-aussi au musée. Nous habitions un petit logis de fonction derrière la galerie des espèces disparues. Trois fois rien : un matelas par terre. des livres, par terre aussi. Une petit réchaud. Une peau d'ours peut-être. Un Albatros suspendu au-dessus du lit. Au matin, tu te jetais à la tâche et je te secondais de mon mieux. Je m'occupais du foyer, conduisait le petit à l'école. Puis j'allais cirer les parquets de la grande galerie de l'évolution où il n'y avait que nous. Et je pouvais à loisir te regarder travailler. Tous les jours.

Mon fils en a eu assez. M'a demandé si on pourrait manger une glace. J'ai quitté à regret cette belle petite vie, comme on sort d'un wagon chaud pour reprendre une marche fatiguée sous la pluie dans la nuit alors que c'est seulement le matin.

A la sortie de la galerie m'attendait un grand cahier, le livre d'or, de la grande galerie de l'évolution. J'ai écrit : "vendredi 22 mars 2013, tu réparais les fesse de la girafe. Je ne t'oublierais jamais." 

Nous sommes le 1er mars 2015 et je le répète. Je n'oublierais jamais ces années que nous avons passé dans la grande galerie. Moi penché sur mon balai, te regardant. Toi les bras levés vers les fesses de l'auguste ongulé et toute la création disposée harmonieusement autour de nous, muette.

Trousseau d'articles pour editoriaux :



vends pour cause changement d'activité :


  • un marteau pour briser les tabous, un treuil pour lever l'omerta
  • un lot de pavés à jeter dans la mare
  • des chaussures de sécurité, au cas où les pavés tomberaient, et aussi  pour donner un coup de pied dans la fourmilière
  • une clef anglaise pour déboulonner la statue du commandeur
  • un torchon ignifugé pour les rencontres gouvernement/syndicats
  • un ensemble de mobilier de salon (tables basses + trois fauteuils) avec mousquetons et masques à oxygène pour les rencontres au sommet
  • le CD-ROM du logiciel de la gauche (fonctionne sous windows Vista)
  • une règle à roulettes, pour faire bouger les lignes.
  • un aller-retour Paris-Asnières en galère, pour les jours de grève des transports (livré avec un aviron)



Tout ce que je sais

 « 1.2. Le monde se décompose en faits. »
 Wittgenstein


Les faits, dans leur ensemble, se divisent en deux catégories :

D'une part, ceux qui n'ont pas encore été portés à ma connaissance
et d'autre part, ceux que je connais.

Cette catégorie elle-même se subdivise en deux sous-ensembles :

d'une part il y a les faits qui nourrissent la conversation et d'autre part ceux qu'il vaut mieux passer sous silence, soit 1) parce qu'ils sont connus de tous, soit 2) parce qu'ils sont insignifiants, soit encore 3) parce qu'ils ne me donnent pas le beau rôle.

Parmi les faits qui nourrissent la conversation, il en existe de plusieurs types : ceux qui donnent lieu à un récit à la première personne, ceux qui expliquent ou exposent un état de fait.

Dans la première catégorie entrent mon humeur du moment, l'étrange aventure qui m'est arrivée la semaine dernière dans la petite allée derrière le Lidl, les professeurs les plus marquants de ma scolarité, les prénoms rares et précieux attribués à des enfants de ma connaissance, les moments embarrassants qui se révèlent comiques quand on les raconte après quelques années, les récits de voyage, d'accouchements, résumés de vie de couple désormais achevée, les démêlés avec des supérieurs hiérarchiques, fonctionnaires, commerçants, opérateurs de téléphonie mobile. Tous ces récits forment la matière de la littérature épique contemporaine.

Dans la seconde catégorie, nouvelle division : il y a les faits que j'ai cherché à connaitre, à vérifier et ceux qu'on m'a appris, comme ça, pour le plaisir de la conversation, entre deux verres de Saint-Nicolas de Bourgueil. Pour le dire autrement, il y a les faits que j'ai découverts, inventés même, par exemple en utilisant un moteur de recherche et la phrase "temps de cuisson béchamel" ou "Peut-on mourir si on a bu du liquide vaisselle ?" et d'autre part, les faits que je connais parce que Jean Baptiste me les a appris.
(Vous pouvez remplacer Jean Baptiste par l'ami de votre choix)

Restent encore les faits déduits d'autres faits. Par exemple :

 1- J'écoute All that is my own de Nico. Nico est une chanteuse d'origine allemande.

               2-1/ Elle a chanté l'hymne national allemand.
               2-2/ Elle est morte d'une chute de Vélo.

                   2-1-1 Écrit par Heinrich Heine.
                   2-2-1 Comme Jean-Edern Hallier.

                        2-1-2 L'unité Allemande n'a pas été une mince affaire.
                        2-2-2 Onze enfants nés en France en 2011 ont été prénommés Edern.
                        2-2-3 Les cyclistes tués sur la route sont principalement des hommes.

Ça se ramifie à l’infini. Et très vite, la lassitude guette. Impossible de faire un graphe, il faut faire rentrer tout ça sous des catégories, ranger tout ça, faire des petits paquets et coller dessus des étiquettes. C'est la seule solution.

Reprenons les catégories les plus précises et les mieux fondées que nous ayons jusqu'à présent : d'une part, ce que je sais grâce à Wikipédia, d'autre part, ce que je sais grâce à Jean Baptiste. Il y en a encore beaucoup trop dans chaque colonne. Comment organiser ce chaos, comment canaliser ce magma indifférencié, cette soupe primordiale, comment entendre la mélodie dans ce tohu-bohu ? De Linné à Mendeleiev, de Dewey à Ranganathan, les taxinomies abondent, mais il leur manque toujours une case.



Voyez par exemple la page de Wikipedia consacrée aux classifications. Elle se donne pour objectif louable de classer les les classifications, de les ranger par thème : (la botanique avec la botanique, la zoologie avec la zoologie, etc), tente une esquisse de classification des types de classifications par modèle d'organisation (alphabétique, chronologique, logique, etc), avant de s'avouer vaincue en regroupant sous la catégorie "autres classifications" les scories informes que son esprit ne peut appréhender. Mais il faut absolument compter avec ce reste, sans quoi la division est fausse. On n'en sort pas. N'en sortira jamais.

Tournons nous vers les grands récits. Les cosmogonies, les Eddas, les vedas et autres encyclopédies chinoises. On y trouve une vision des faits organisée où les vaches sont bien gardées et où chaque chose se tient debout sous le soleil, à sa place.
Mais peut-on croire encore ces contes de bonne femmes ? Peut on classer le souci avec le soleil parce qu'ils sont tous les deux jaunes ? L'aigle avec la pensée, car tous deux s'élèvent ? Les chiens, les chaises et les équations du quatrième degrés sous la rubrique Quadrupèdes ?



L'anthropologie est comme un grand sac : on y fourre tout. Plongez-y la main en aveugle, en cherchant un symbole, vous trouverez toujours ce que vous cherchez  : la femme est humide. La mer aussi. La femme saigne. Le sang est salé. La mer aussi. Donc la mer est la femme ou peu s'en faut. Les pensées archaïques, c'est le bordel. Je ne sais pas comment les gens faisaient pour s'y retrouver dans leur savoir. Et à la fin tout est dans tout et vice-versa, comme disait ma grand-mère.

Il faut se rendre à cette évidence que la logique échoue à diviser le monde en parts congrues, que le mythe ou la poésie ne peut jouer ce rôle de bibliothécaire du monde, en ce qu'elle nous dit que toute chose est autre chose. Il faut donc être pragmatique : la classification la plus juste est la plus efficace, la plus opérante. Puisque rien ne tombe juste, rangeons les faits là où ils sont utiles.

Pour moi, c'est tout vu. Depuis que je me suis donné cette ligne de conduite, je n'ai pas été long à trouver l'ordre juste, celui qui pose chaque fait à sa lace sous le soleil et dans la conversation, dans mon paysage mental et à la fin du repas : comme un bouddhiste, mon monde est désormais une roue multicolore.



Seul le Trivial Poursuit permet de ranger avec précision la connaissance de chaque fait là où elle est d'une utilité immédiate : en réponse à une question déterminée aléatoirement. En guise d’expérience, pour mettre à l'épreuve ce mode de classement, je tiens depuis quelque mois un recensement quasi-complet de toutes mes requêtes sur Wikipédia. Cette liste, hétéroclite comme il se doit, puisqu'elle reflète l'état de ma curiosité au fil des jours et des questions qui surgissent, peut être classée en six couleurs : Orange (sports et jeux), Rose (Spectacle), Vert (science et nature), jaune (Histoire et société), Bleu (géographie) et Marron (Arts et lettres).  J'ai intitulé "Ce que je sais", un grand tableau Excel qui me permet de constituer au jour le jour un savoir bien organisé. Quand j'aurais fini de lire Wikipedia, je commencerai un catalogage rétrospectif de mes connaissances antérieures à 2014. Après je pourrai mourir.

Ci dessous, un extrait de ce que je sais à ce jour.

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Faitcatégoriecamembert
"Chuck" est un dérivé du prénom "Charles", qui en japonais se dit "Charuru"arts et lettresmarron
Abraxas (ou Abrasax) est une figure démoniaque, symbole de la création. Son nom est une des sources possibles de la formule abracadabra.arts et lettresmarron
Ajantâ est un village indien célèbre pour ses vingt-neuf grottes artificielles sculptées dans du basalte.histoire et sociétéjaune
Au Québec, les bisounours sont appelés Calinours, pour ne pas évoquer la "bizoune" qui désigne le pénisspectaclerose
Diomede, roi d'Argos, arrive deuxième de la guerre de Troie pour ce qui est du nombre de victimes.Arts et lettresMarron
En 2003, le gouvernement Moldave a fait publier un dictionnaire bilingue Moldave-Roumain.histoire et sociétéjaune
En dix ans, de 2000 à 2010, la ville de Kinshasa a vu sa population augmenter de 3 millions géographiebleu
Eugénie Cotton, militante et scientifique lauréate du pris Staline, a donné son nom à un cratère vénusien.Sciencesvert
Eupatoria est la ville où débarqua le corps expéditionnaire franco-anglais au début de la guerre de criméeHistoire et sociétéjaune
Eupatoria, qui donne son nom à une rue de Ménilmontant, est une ville de Crimée, en Ukraine. Elle est nommée en hommage à Eupator, surnom du roi Mithridate.Geographiebleu
Goulebenèze, le fameux barde saintongeais, s'appelait en réalité Marc-Henri Evariste Poitevinarts et lettresmarron
Iwan Rheon, l'acteur qui joue Ramsay Bolton dans Game of Thrones jouait auparavant Simon dans the Misfits.arts et lettresmarron
Josef Rotblat est le seul scientifique a avoir quitté le projet Manhattan avant la destruction d'Hiroshima.histoire et sociétéjaune
Kamehameha est le nom de cinq souverains d'HawaiiHistoire et sociétéjaune
l'académie française attribue régulièrement 55 prix : 1 de cinéma, 6 de
poésie, 19 de littérature, 12 d'histoire et 8 de philosophie.
arts et lettresmarron
L'Ahnenerbe, division SS consacrée à l'histoire des origines du peuple Aryen, situe celles-ci en Atlantide.Histoire et sociétéjaune
L'alphabet glagolitique est le plus ancien alphabet slave : il existe en deux versions carrée et ronde.histoire et sociétéjaune
l'ammoniaque est le nom donné à la solution aqueuse d'ammoniac (NH3)sciencesvert
L'orthographe rouge-gorge(s) est préférée par le Centre national de ressources textuelles et lexicales, mais la Commission internationale des noms français des oiseaux utilise l'orthographe rougegorge(s).sciencesvert
L'une des CocoGirl, de Stéphane Collaro, a épousé un membre du groupe "les forbans"spectaclerose
L'école normale supérieure a été créée durant la Révolution Française.Histoire et sociétéjaune
L'écrivain Rémy de Gourmont était défiguré par un lupus.arts et lettresmarron
La charente est un fleuve, pas une rivière.Geographiebleu
La citerne Basilique se situe à Istanbul. Elle date de 532. sa capacité est de 78000m3. On y trouve des carpes.géographieJaune
La commission Internationale de nomenclature zoologique, basée à Londres, comptait 5 membres lors de sa fondation en 1895 : ils sont aujourd'hui 25.sciencesvert
la nébuleuse du hamburger de Gomez est un corps astral en forme de hamburger decouvert par un astronome mexicainSciencesVert
La Roche-sur-Yon a changé huit fois de nom en 70 ans.histoire et sociétéjaune
la ville de Rezé, en Loire Atlantique, fut initialement fondée par les tribus ambilatres et anagnutes.histoire et sociétéjaune
La-mort-au-juifs est un hameau du Loiret, dont le nom pourrait être une déformation de "la mare aux geais"Geographiebleu
le coefficient de Gini est un indicateur statistique de la distribution dans une population. Il varie de 0 (égalité parfaite) à 1 (inégalité maximale)sciences
Le Croult est une rivière de Seine Saint-Denis, qui prend sa source au trou du Diable, à Goussainville. ses affluents sont le Rouillon et la Molette. Tous trois sont enfouis.géographiebleu
Le grade de Maréchal des logis correspond à celui de sergent dans les régiments de cavalerie, du train, d'artillerie et de gendarmerie.Histoire et sociétéjaune
le larigot, le gros nasard et la montre espagnole sont des registres de jeu d'orguearts et lettresmarron
Le méridien de Paris passe à Dunkerque, Amiens, Saint-Denis, Gentilly, Carcassone et Sainte-Marie LapanouzeGéographiebleu
Le nom de la capitale du Kazakstan, Astana, signifie littéralement "capitale" en kazak.Geographiebleu
Le syndrôme de Cotard est un délire hypocondriaque qui se traduit fréquemment par l'impression de voir un de ses organes pourrir, se nécroser. Le risque suicidaire y est maximal.sciencesvert
le Zinzolin est une couleur dont la définition a varié au fil des siècles de rouge à bleu en passant par Orange. On y voit aujourd'hui du violet.Arts et lettresmarron
Leiji Matsumoto a donné une version des Nibelungen. Albator y joue un rôle. arts et lettresmarron
Les Calville sont des variétés de pommessciencesvert
Les Espaces d'Abraxas est un ensemble de logements de Noisy-le-Grand. Stéphanie de Monaco y a situé le clip de sa chanson "ouragan"arts et lettresmarron
les iles Chagos, dans l'océan indien, abritent une base navale américaine, en vertu de quoi les habitants de l'île déportés en 1967, se sont vu refuser le droit de retour sur leur sol natal par la chambre des lords britanique.géographiebleu
Les mongols craignent le ver géant de Mongolie, ou Olgoï-Khokhoï, soit littéralement : ver à gros intestinHistoire et sociétébleu
Mattt Konture est le petit-fils de Georges de la Fouchardièrearts et lettresMarron
Pamela Des Barres, la fameuse groupie, a été la nounou des enfants de Frank Zappaspectaclerose
Paul Ramadier, premier président du conseil de la 4e république, était surnommé "Ramadan" lors de son passage au ministère du ravitaillement dans l'après-guerrehistoire et sociétéjaune
Richelieu, évèque de Luçon, parle de "l'évèché le plus crotté de France"géographiebleu
Un fleuve se jette dans la mer, une rivière dans un autre cours d'eau.géographiebleu
Un rat-de-cave est a la fois une bougie, un agent des douanes et un danseur de bebopArts et lettresMarron
un grand dodecicosidodecaedre a 104 faces, 180 arètes et 60 sommetssciencesvert
la balle de sepak takraw est traditionnellement faite de rotin tressésports et jeuxorange
C'est à tort que l'on prétend qu'un mascaret a emporté Léopoldine, la fille de Victor Hugo. Le coefficient de la pleine mer du jour du drame, n'était que de 45, une valeur beaucoup trop faible pour permettre un mascaretArts et lettresmarron
Le plus puissant mascaret du monde (une vague de près de 9 mètres de haut remontant la baie à 40 km/h) a lieu dans la baie de Hangzhou et concerne le fleuve Qiantanggéographiebleu
Le soufre est transporté sous forme liquide à une température de 135°C, par des navires appelés soufriers.sciencesvert
Le prélude du Te Deum de Charpentier a été longtemps l'indicatif de la retransmission télévisée du concours de l'Eurovision. Il a été composé pour célébrer la bataille de Steinkerque ou 20000 hommes sont mortsArts et lettresmarron
Un vavasseur est le vassal d'un vassal : sa seigneurie est transmissible, mais pas divisible.histoire et sociétéjaune
De Christoph Schaffrath, auteur de 72 concertos et 40 sonates pour clavecin entre 1709 et 1763, on ne sait quasiment rien.arts et lettresmarron
Les Cent-Jours ont en réalité duré cent dix jours, du 1er mars au 18 juin 1815.histoire et sociétéjaune
La devise révolutionnaire "liberté, égalité, fraternité..." comportait dans sa forme initiale cette formule supplémentaire "...ou la mort". histoire et sociétéjaune
le massicot est une machine à couper le papier, mais aussi un des noms de l'oxyde de plomb (PbO)sciencesvert


Cette petite plaisanterie est directement inspirée du livre de Max Frisch l'Homme apparait au Quaternaire, disponible chez les libraires ou dans les bonnes bibliothèques. Je vous interdis formellement de le lire. J'entretiens l'illusion d'un rapport exclusif entre ce livre et moi.L'idée du tableau Excel "Tout ce que je sais" m'a été gracieusement suggérée par Annabelle.


Deux dialogues sur la transmission des valeurs

- T'as compris, toi ?
- Compris quoi ?
- Ben le cours, là.
- Bah, je crois, ouais. Qu'est ce que t'a pas compris, toi ?
- Je sais pas... c'est pas clair. Le mec, il écrit une histoire, et il raconte d'abord la fin, en partant du milieu ; tu vois ?
- Oui.
- Et vingt ans après, bim ! il écrit le début.  Du coup ceux qui ont découvert l’œuvre au fur et à mesure sont bien attrapés, ils croyaient connaitre une histoire et en fait, ils en avaient que la moitié.
-à mon avis, c'est surtout pour les autres, ceux qui découvrent l'histoire dans l'ordre, que c'est difficile.
- Tu crois ?
- Ben oui, réfléchis : tout ce qui relevait du suspense et du coup de théâtre dans la fin de l'histoire est révélé de façon immédiate dans le début. Du coup, ça casse le dispositif narratif initialement mis en place.
- Le dispositif narratif, d'accord...mais attend, quel coup de théâtre ?
- Ben tu sais, quand il lui révèle que en fait il est son fils, comme dans un drame bourgeois.
- Attends, qui est le fils de qui ?
- Mais Luke ! C'est le fils de Dark Vador !
- Dark Vador ? Le genre de motard méchant, là ?
- Oui ! Le mec avec un casque qui respire fort. C'est le père !
- Le père du petit garçon ?
- Non, ça c'est lui quand il était jeune ! Mais alors toi, t'as vraiment rien suivi...
- C'est pas ma faute. Reconnais que c'est quand même extrêmement emmerdant, ce cours. Toi encore, tu vas t'en sortir. Mais moi, aux partiels, je vais me ramasser. J'aurais dû m'inscrire en super-héros.
-Y a trop de monde en super-héros. Tous les  mecs qui sont pas assez doué en maths pour les jeux vidéo et pas assez cultivés pour Star Wars finissent en super-héros. Les amphis sont plein de mecs qui croient être des intellectuels tout ça parce qu'ils ont lu deux Batman et le livre de Michel Onfray sur les X-Men...
- Tiens d'ailleurs, t'as entendu la nouvelle ? Il parait qu'il va pas bien du tout...
- Onfray ?
- Oui, il ne passera pas l'hiver, à ce qu'on raconte.
- C'est triste à dire, mais c'est sans doute mieux comme ça. Moi, je considère que qu'il a cessé d'être lisible il y a bien longtemps.
- Note bien, son livre sur l’égoïsme rebelle était pas mal. Comment ça s'appelait, déjà ?
- Manifeste pour un Sarkozisme hédoniste.
- Ah oui. Enfin en attendant, moi j'y comprends rien à Star wars et ça me lasse. C'est d'un académisme...
- Ecoute, c'est simple : Batman, c'est à la fois Batman et Bruce Wayne, d'accord ? Et bien dis-toi que Dark Vador c'est à la fois Anakin Skywalker et Dark Vador.
- Pas mal, tu crois que je peux l'écrire sur ma copie ?
- Pourquoi veux-tu écrire ça ?
- Ben, pour faire un parallèle. Montrer que j'ai des références.
- Il y a dix ans, je t'aurais dit oui, mais crois-moi : aujourd'hui, mieux vaut oublier la référence à Batman. Elle te signale comme semi-instruit et grossier cuistre.
- J'y arriverai jamais. Je suis pas fait pour les études. Je sais pas comment tu fais...
- Te concentrer tu dois
- Je quoi ?
- Laisse tomber.


******

- Tu reprends un verre ?
- Ma foi, il est pas dégueu ton cognac. Qu'est-ce que tu fais ce week-end ? Ça te dit de pousser jusqu'à la côte s'il fait beau ? Sophie et moi on n'a pas vu la mer depuis des mois.
- Hélas, je crois bien que je vais passer le week-end à corriger les dissertations de mes étudiants.
- Pauvre vieux. Moi, je leur fais préparer des dossiers en groupe, ça fait moins de boulot et pour eux et pour moi. C'est sur quoi, ces dissert'?
- Le dispositif narratif de Star Wars et son lien avec les principaux motifs thématiques.
- Aïe !
- A qui le dis-tu ? Je vais encore me taper des pages et des pages de bavardages prétentieux sur l'horizon d'attente du spectateur...
- ... des résumés de l'intrigue...
- Tais-toi ! La dernière fois il y en a un qui s'est cru obligé de me faire un schéma...
- Sans parler de  leur analyse de la partition musicale...
- Tu veux dire de leur absence d'analyse de la partition musicale. Ils te disent tous "Bon, ben y a des leitmotive musicaux" mais  y en a pas un pour préciser leur fonctionnement ou leur utilité. Tu vois, c'est vraiment ça qui me navre. Pas leur ignorance, mais leur indifférence. Je veux dire : qu'ils ignorent encore l'ordre de succession des épisodes de Star Wars en seconde année de licence, c'est triste, mais c'est comme ça. Ce qui me désespère, c'est que même les bons étudiants un peu moins ignares s'en foutent au fond, de Star Wars. Sorti des cours et des révisions, ils n'y pensent jamais. Ils ne cherchent pas à comprendre. C'est juste un travail dont ils doivent s'acquitter. 
- Etais-je différent à leur âge ?
- Moi, en tout cas, oui. C'était important pour moi. Et Batman, et Super Mario  et Pirates des Caraïbes. Ça a fait de moi l'homme que je suis aujourd'hui.
- Que veux-tu mon vieux, on est une discipline de relégation dans une fac de province. On se récupère tous les étudiants qui ne savent pas où aller.
- J'aurais dû faire Classique, j'aurais eu des étudiants motivés. 
- Tu te vois, toi, enseigner Duras ou Truffaut toute l'année ? Merci, mais non merci. En plus faut voir la gueule des étudiantes. Motivées, c'est certain, mais y en a pas une de baisable ! Et puis tu vas me foutre le cafard, à pleurer sur la disparition de la culture ... Ressers-moi un cognac, tiens.
- Tu as raison. Désolé.
- Excuses acceptées, capitaine Needa

(ils rient)

Exemple d'humour, XXIe siècle, voir notes en fin de volume.










L'écrivain accomplit une fonction, l'écrivant un acte.

L'écrivain accomplit une fonction (comme le Cardinal de Retz), l'écrivant un acte (comme Roland Barthes).

L'écrivant vieillit mal (comme Swift), l'écrivain ne meurt jamais (comme Jean D'Ormesson).

L'écrivant finit à l'académie française (comme Chamfort), l'écrivain se suicide (comme Chamfort).

L'écrivant vend, l'écrivain, rien.

L'écrivant aime les mondanités (comme Proust), l'écrivain aime les chats (Proust était sûrement allergique).

L'écrivain est dégoûté (comme tout le monde), l'écrivant a bon appétit (comme Gertrud Stein).

L'écrivant gagne bien sa vie (comme Chateaubriand), l'écrivain est voué à l'échec (comme Houellebecq).

L'écrivant tourne à tous vents (comme Gide), l'écrivain est un roc. (Solitude, récif, étoile)

L'écrivant aime les mots, l'écrivain aime les maltraiter.

L'écrivant veut coucher avec ses lecteurs/trices, l'écrivain veut embrasser l'aube d'été.

L'écrivant est souvent diplomate (comme Stendhal), l'écrivain est en guerre (comme BHL).

L'écrivant est un assis (comme Joe Bousquet), l'écrivain se tient debout (comme Dominique de Villepin)

L'écrivant habite à Saint-Germain-des-Prés (comme Sartre), l'écrivain est en résidence avec le concours de la région (comme François Bon).

L'écrivant partage son temps entre Paris et sa maison de campagne, l'écrivain enseigne le français en lycée professionnel.

L'écrivain ressuscite le passé (comme Juliette Benzoni), l'écrivant règle ses comptes (comme Thomas Bernhard.)

L'écrivain résiste (comme Sollers), l'écrivant lâche tout (comme Breton).

Où qu'il soit, l'écrivain est un exilé (comme Gombrowicz), L'écrivant est un touriste (comme Stendhal).


Pour 2015, j'avais pris la résolution d'écrire une suite d'article sérieux pour dissoudre un certain nombre d'idées reçues. La distinction "écrivain/écrivant", qu'on doit à R. Barthes, me semblait un bon point de départ. Évidemment tout ce que j'ai su écrire, c'est cette espèce de liste, que je vous invite à poursuivre chez vous, ou à chaque fois que vous vous trouverez dans une librairie.