Ce que je sais

Petit, j'avais des idées confuses. Par exemple, il m'arrivait de confondre l'euphorbe maritime et le pourpier du littoral. Je n'étais sûr de rien : cette mouche qui vole dehors n'est-elle pas la même que celle qui était dedans il y quelques instants ? Se pourrait-il qu'elle soit passée à travers la vitre ? Mes frontières étaient celles d'un État jeune au sortir de la grande guerre. Si ma main touche mon genou, est-ce ma main qui sent mon genou ou mon genou qui sent ma main ?




Aujourd'hui c'est tout à fait l'inverse. Je sais pour qui ne pas voter, par exemple. Dans le doute, je m'abstiendrais.
Je sais si je dois conclure par cordialement, bien cordialement, bien à vous, je vous prie d'agréer l'expression de mes salutations respectueuses ou encore Je pose ma tête sur le billot Madame et vous l'offre en holocauste. Je sais presque à coup sûr si les bises, chez nous, c'est trois ou quatre. Je ne confonds plus le Gyoza et le Momo. Le Diable Amoureux de Cazotte me plait plus que Le Diable Boiteux de Lesage et d'avantage le Cognac que le Whisky. Je suis un adulte fini. Que me reste-t-il à découvrir ?

Par contre, je ne sais plus si on se tutoie.